A l’école de la Presse

L'influence croissante des chaînes d'information en continu soulève des questions sur le rôle de la presse dans les sociétés et sur l'éducation aux médias, devenue essentielle mais néanmoins défaillante, le sensationnel attisant et nourrissant l'appétit instantané.

Alors que les débats toujours plus houleux se multiplient sur le poids et le rôle des chaînes d'informations en continu, il n'est pas aujourd'hui inopportun de s'interroger sur la fonction première des médias et de la presse dans un monde bouleversé par l'explosion des réseaux sociaux et de l'information en temps réel.


Beltway Insider: Biden/Israel/Gaza Post Conflict, Fighting Resumes, Santos Expelled, Henry Kissinger, Rosalynn Carter, Sandra Day O’Connor

D'un point de vue historique et étymologique, la fonction de la presse reste celle d'informer avec, point d'éthique fondateur, une obligation permanente d'objectivité. Obligation certes mais qui dès l'origine a souvent été éludée au profit de ce qu'il est couramment commun de nommer la presse d'opinion. Jusqu'alors, que le monde de la presse soit scindé en plusieurs chapelles, souvent teintées d'appartenances politiques distinctes, ne semblait pas émouvoir le grand public qui trouvait dans la pluralité journalistique le ou les supports qui lui convenait et ce au regard de la sensibilité de chacun.

Immédiateté

Mais l'émergence des réseaux sociaux, immédiats et instantanés, faisant de n'importe quel quidam muni d'un téléphone mobile équipé d'une caméra un journaliste de circonstance, ont poussé nombre de supports à devoir se réinventer pour répondre à cette demande d'immédiateté d'ailleurs née de l'offre d'information souvent brute, non vérifiée et sujette à caution délivrée par ces journalistes, au mieux, en herbe, au pire accidentel.


Rousseau et la Fracture

S'en est donc suivi une cascade de surenchère informationnelle que le commun des mortels, habitué jusqu'alors à un paysage médiatique arrêté, a reçu frontalement, parfois en le refusant, souvent en l'acceptant. Désormais rivé devant des chaînes d'informations continu souvent elles-mêmes friandes des rebonds des réseaux sociaux, le grand public s'abreuve d'une actualité multiforme et facilement orientable car adressée à des téléspectateurs avides d'informations et non plus de réflexion.

Cette dernière vécue comme exigeante et laborieuse a cédé le pas à une information débitée à un tel rythme qu'elle empêche toute forme de recul pourtant nécessaire à une compréhension juste du monde. Associée à une éducation aux médias défaillantes dans les établissements scolaires eux-mêmes rongés par l'influence des réseaux sociaux, une atmosphère paradoxale a ainsi émergé au sein de nos sociétés où se disputent méfiance croissante envers les médias et plébiscite des chaînes d'infos souvent premiers vecteurs d'informations pour une opinion désormais sans repère.


Tenter le Diable

Torrents d'informations

Car la presse a longtemps joué un rôle de repère. La fiabilité des informations diffusées, vérifiées et attestées, la compétence des journalistes, cultivés et pondérés, autant d'éléments qui, conjuguées au rôle et à l'influence de l'école, structuraient des sociétés fières de pouvoir se prévaloir de la liberté d'expression et de la presse.


Une Présence à Haut Risque

Or, si ces deux libertés n'ont pas disparu, leur utilisation peut aujourd'hui être discutée car celles et ceux qui s'en prévalent et en usent, le font sans mesurer les conséquences qui en découlent. Au nom de l'information et de la liberté consubstantielle qui la sous-tend, les chaînes d'informations en continu déversent des torrents d'informations sans nécessairement imaginer l'impact que celles-ci auront sur les téléspectateurs.

Car de l'autre côté de l'écran, c'est un public pluriel et divers, aux références, aux principes, à la culture tous différents les uns des autres qui reçoit ces informations et qui ne réagira donc pas nécessairement de la même manière au flot informationnel.

Peu évoquée par peur de stigmatiser ceux qui n'en n'ont pas reçu, l'éducation au médias est pourtant essentielle pour comprendre leur rôle et leur mode de fonctionnement tant il s'avère, comme évoqué précédemment, que celle-ci est défaillante. Pis ! Force est de constater que ce sont aujourd'hui chaîne d'informations et réseaux sociaux, in fine des outils d'informations, qui se voient quelque part chargés de cette éducation au médias. Comme si le marteau enseignait au charpentier comment l'utiliser.

 

Bio: Olivier Longhi possède une vaste expérience en histoire européenne. Journaliste chevronné avec quinze ans d'expérience, il est actuellement professeur d'histoire et de géographie à la région de Toulouse en France. Il a occupé divers postes dans le domaine de l'édition, notamment ceux de chef d'agence et de chef de l'édition. Journaliste, blogueur reconnu, éditorialiste et chef de projet éditorial, il a formé et dirigé des équipes éditoriales, a travaillé comme journaliste pour différentes stations de radio locales, consultant en presse et en édition et consultant en communication.

Haute Tease