De l’ordre ! Et Après

La volonté du Président Macron de rétablir l'ordre dans la société française répond à une injonction populaire ponctuelle qui offre l'avantage de s'affranchir du règlement de questions sous-jacentes mais pourtant impérieuses. Explications.

En déclarant lors de sa dernière allocution télévisée vouloir rétablir l'ordre à tous les niveaux de la société française, le Président de la République prend le risque d'ouvrir la boîte de Pandore. Pourquoi ? Car la notion d'ordre est tout à la fois simple et multiforme, ce qui en fait un paradoxe à elle seule d'où la complexité de l'appliquer ou de la décréter comme objectif.


Le Climat et l’avenir

L'ordre, aux yeux du Président, serait donc un moyen d'accéder à un autre état, une autre situation qui reste à définir mais de différente de celle qui prévaut à ce jour.

Pourtant, invoquer l'ordre, qu'il soit de nature familiale ou scolaire, pour ne citer que ceux que le Président de la République a invoqué, renvoie à décréter celui-ci comme n'importe quels fondamentaux tels que la croissance économique, le plein emploi, la fin de la misère ou des inégalités. Qui plus est, appliquer l'ordre suppose aussi de nouveaux moyens qui, pour l'heure, ne sont ni à disposition ni financés.


Un Monde à Part

Education et Compétences

Prenons l'exemple de l'Ecole. Souvent citée comme illustration du délitement de l'ordre, celle-ci se trouve confrontée à des situations de plus en plus épineuses : insolence et mépris des élèves à l'endroit des enseignants, prise à partie de ces derniers par des parents eux-mêmes souvent en rupture avec l'institution scolaire, défiance et contestation à l'endroit des sanctions appliquées...Bref !

La liste n'est en rien exhaustive et appelle naturellement une action à même de rétablir une situation sereine propice à la diffusion des connaissances. Mais est-ce que cette situation mérite le terme d'ordre ? La solution est certainement à chercher ailleurs notamment dans la question de l'éducation des parents, et par voie de conséquence, des élèves.

Comprendre que l'Ecole est un espace d'apprentissage et d'émancipation de l'individu par le savoir afin que ce dernier devienne un citoyen de la République respectueux des règles qui la régissent relève, non pas de l'ordre, mais plus simplement de la vision et du rôle que chacun confère à l'Ecole.


Poutine et le Déluge

Ainsi, si l'Ecole était perçue comme la première strate d'un processus global de formation de l'élève, processus qui débute dès le primaire pour s'achever en classe de Terminale ou via d'autres voies d'apprentissage (l'enseignement supérieur relève d'une autre logique mais qui se base cependant sur les acquis précédents), l'Ecole ne serait pas confrontée, ou dans des mesures bien moindre, à la nécessité de rétablir l'ordre puisque son autorité et sa compétence formatrice seraient respectées et reconnues.

Rapport droit - devoir

Il peut en aller de même pour ce qui est du rapport à la Justice, aux forces de l'ordre, et plus largement, aux règles autour desquelles s'articulent la République. Là encore, une question d'éducation se pose. Qu'est-ce que la République ? Cadre législatif ou espace de vivre-ensemble ?


Le Risque du Faux Pas

Les deux, le premier permettant le second. Mais à ce jour, force est de constater que ce rapport est déficient car de nombreux individus ont oublié, s'ils l'ont déjà appris un jour, le sens de la notion de République voyant ainsi dans les institutions qu'elle porte (Ecole, Police, Justice,...) des organes de contraintes qui réduiraient leur liberté individuelle et leurs droits fondamentaux.

Enfin, l'appel à rétablir l'ordre se veut peut-être aussi la conclusion d'une réalité historique qui remonte aux premières heures de la Révolution Française. En glorifiant, à raison, la notion de droit qui avait été battue en brèche par l'Ancien Régime, ère d'obligations diverses et d'obéissance sourde, les philosophes des Lumières, sans vouloir leur intenter un quelconque procès d'intention, ont négligé dans leur réflexion la notion de devoir, pourtant indispensable dans le rapport droit-devoir conditionné par la République.

En revendiquant toujours plus de droits au nom des libertés individuelles, revendication à l'origine d'une forme de violence verbale ou physique (il suffit pour le mesurer de comptabiliser les agressions commises à l'endroit des personnels hospitaliers), nombreux sont ceux qui ont oublié qu'un droit, quel qu'il soit, peut effectivement s'exercer à condition d'être précédé d'un devoir rempli. Là encore question d'éducation et pas nécessairement d'ordre.

 

Bio: Olivier Longhi possède une vaste expérience en histoire européenne. Journaliste chevronné avec quinze ans d'expérience, il est actuellement professeur d'histoire et de géographie à la région de Toulouse en France. Il a occupé divers postes dans le domaine de l'édition, notamment ceux de chef d'agence et de chef de l'édition. Journaliste, blogueur reconnu, éditorialiste et chef de projet éditorial, il a formé et dirigé des équipes éditoriales, a travaillé comme journaliste pour différentes stations de radio locales, consultant en presse et en édition et consultant en communication.

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